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Dominique Goblet
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Bienvenue au royaume de La Mère.
Une femme recherche des hommes sur des sites internet dédiés aux rencontres ardentes. On l'appelle "La Mère". Personnage central du Jardin des candidats, figure mythique de l'adoration, elle est la grande absence.
Séparée de son mari, éloignée de sa fille, cette femme cherche l'amour. Sa maison est envahie des amas de livres détrempés, pendant que son grand jardin est marqué pas une piscine inachevée, abandonnée en plein cours de construction. Sa vie, sa maison, elle ne nie pas les problèmes, non... La Mère, déesse du jardin, n'a pas de problème. Elle est l'unique divin problème. Dans son mental, le jardin prend des dimensions illimitées, vaste espace pour le théâtre de ses désirs et de ses frustrations. Mais dans son jardin, elle contrôle tout. Quand il fait soleil ou quand il pleut, c'est parce qu'elle en a besoin.
Les candidats, repérés sur internet, sont rassemblés tous ensemble dans le parc, parmi les buissons, les vases, les paons, les livres, les trous et le barbecue. C'est la grande réserve naturelle des prétendants de La Mère. Ils errent dans le jardin, ils besognent, jardinent ou se délassent. Ils attendent.
Tous comprennent immédiatement la chance qui leur sera donnée : ils sont mis à genoux, devant la grande suprématie de La Mère. Invités au jardin pour mettre en valeur leurs aptitudes et se montrer digne d'un rendez-vous très spécial avec elle, dans sa maison... Et pour atteindre cela, ils sont prêts à servir et souffrir pour la satisfaction de La Mère, trouver leur bonheur dans l'éternelle frustration. Ils cherchent l'amour absolu, l'amour divin qu'une seule femme au monde est capable de leur donner... La Mère.
Soudain, sans prévenir, la voilà au milieu du jardin, exposant ses formes harmonieuses aux rayons de soleil, dirigeant leurs jeux coquins ou contrôlant leurs travaux. Promesse étant faite au plus méritant de la rejoindre dans l'intimité de ses appartements. Mais le temps passe, les saisons se suivent, les apparitions sont comptées et les candidats sont dans le jardin. Personne n'a encore été appelé à pénétrer les murs de la maison de brique.
On peut lire la joie sur le visage de candidats. Les larmes coulent sur leurs joues, alors que profondément en eux, chacun, même le plus stupide, sair qu'il ne pourra jamais convaincre La Mère de le choisir pour être son homme. Ils ne pourront pas satisfaire le désir de La Mère. Sachant ça, pourtant, ils ne vont jamais perdre l'espoir. Et c'est cela leur bonheur. -
Maintes fois annoncé, Faire semblant c'est mentir est le résultat d'un travail autobiographique réalisé par Dominique Goblet sur douze ans. Le temps joue un rôle complet dans ce livre où recherches stylistiques et narratives se mêlent au déroulement du récit. Faire semblant c'est mentir est le chef-d'oeuvre de Dominique Goblet, et probablement l'un des livres les plus essentiels tant du catalogue de L'ASSOCIATION que de la forme autobiographique.
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Dans les Flandres, Ostende et ses environs, où la mer dort ou s'abat sur les digues, où paissent tout le jour de tranquilles vaches, où une femme solitaire se dénude en public, où des formes géométriques envahissent le ciel...
Ostende, premier volet de la série Derrière, est au premier regard une série de peinture, promenade mélancolique dans les paysages sereins des Flandres. Mais sous leur beauté picturale, hors du temps, ces paysages sont prêts à éclater, habités d'hypothèses quant à ce que cachent les apparences et l'habitude, habités de désirs, fantasmes, formes - chair ou abstractions - dont on ne sait s'ils sont réels ou imaginaires. Une grammaire géométrique perturbe l'espace, des bruits rompent un confortable silence et le font parler, comme des accidents dans le décor d'un spectacle bien rôdé, des déchirures dans une toile bien connue, par lesquels s'engouffrent sensations, tensions, désirs...
Entre autres visions, nous rencontrons Irène, sexagénaire qui aime à se dévêtir en milieu naturel, sous le regard d'hommes en costume cravate qui jamais ne la toucheront. Irène cherche l'extension du domaine des sens et du corps, l'élargissement de la perspective. Elle veut toucher du doigt l'impalpable et s'y fondre, être touchée, submergée, voir ce qui bout sous la surface tranquille des choses. À Ostende, il s'agit de quitter une vie, où l'habitude et des sens corsetés nous tiennent, pour une autre, dans le même lieu et à la même époque. Le temps se dilatte sous la force émanant d'un paysage, ou se contracte lorsqu'un détail, un geste ou un visage témoignent d'une vie entière.
Posant des yeux à la fois voyeurs et bienveillants, Ostende déchire la surface que nos yeux se bornent à voir, saisit ce qui se passe horschamp, où rugissent en silence des désirs, des élans vitaux, où dansent sensations et abstractions. Derrière la digue, dans une ferme isolée, sur une plage la nuit, ses paysages forment une scène où tout peut survenir, calme avant l'orage de sensations. Un contrechamp fourmillant d'aventures cachées s'installe petit à petit, révélé par une prose suggestive, procès verbaux de scènes érotiques ou libératrices.
Dominique Goblet souffle le froid et le chaud, nous fait errer, chercher. Elle nous fait glisser de la douceur à la brutalité, du loufoque au sublime, sur un fil entre un réel trop calme et un imaginaire luxuriant. Notre soif de liberté et notre peur de l'inconnu se confrontent sans cesse, et peu à peu se concilient dans l'envie.
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« Souvenir d ' une journée parfaite explore les frontières ténues entre autobio- graphie et fiction et capture avec grâce la fragilité d'un souvenir lumineux.
Longtemps épuisé, Souvenir d'une jour- née parfaite dévoile l'ampleur du travail de Dominique Goblet : intime, puissant. » Tout commence par une visite au cimetière.
L'auteure tente de retrouver le nom de son père parmi une forêt de vies disparues, sans y parve- nir. Frappée par cette disparition, elle s'attache alors aux traces qui subsistent et à un nom en particulier : Mathias Khan (1945-1988).
Mathias Khan, Memento Mori : Souviens-toi que tu vas mourir. Conscient de sa mort imminente, Mathias Khan retient le présent : il rejoint celle qu'il aime, profite d'une balade en forêt, essaie en quelques mots d'immortaliser la perfection d'un voyage vers la mer. Des souvenirs gravés dans un petit agenda, a present time book.
« Chaque déchirure est une histoire. » Faute de pouvoir saisir la dernière présence tangible d'un père, le récit s'engouffre dans l'existence d'un autre. Passé, présent, la vie, la mort : le dessin même explore ce mouvement que nul ne peut interrompre, imitant sa fugacité, ou déployant sa densité. Pour vaincre la disparition, Dominique Goblet fixe mille sensations qui donnent corps au souvenir : un ciel tumultueux, une pluie fine, la beauté d'une lumière automnale, la quiétude de la forêt, la rondeur et l'éclat réconfortant des châtaignes - le fruit des défunts -, l'harmonie d'un moteur et de deux êtres à l'unisson.
Publié initialement en 2001 dans le cadre du projet Récit de ville, Souvenir d'une journée parfaite rappelle qu'une cité se construit par strates : on y détruit, on y jette, on y brûle, on y meurt ; on y construit aussi. On y vit, on y aime.
Édité à l'époque à 3000 exemplaires, le livre révéla une artiste majeure, consacrée par la suite avec Faire semblant c'est mentir. Depuis, Souvenir d'une journée parfaite Dominique Goblet a multiplié expositions per- sonnelles, collaborations et résidences, tant en Belgique qu'à l'étranger. Pour appréhender l'oeuvre de cette auteure de renommée interna- tionale, la réédition de Souvenir d'une journée parfaite était donc essentielle.
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Ostende - le carnet est l'origine du livre paru quelques semaines plus tôt, la coulisse où le ballet se prépare, la planque reculée d'où l'on peut mieux observer le paysage, la palette où se mélangent les formes, les couleurs, les gestes des personnages et de leur créatrice. Il témoigne d'une oeuvre en gestation, là où Ostende est l'aboutissement de ce travail. Des objets y mutent comme des êtres vivants, des humains évoluent, expérimentent en secret, se découvrent. Des idées naissent, changent, se fixent mais le plus souvent s'y refusent, avant de trouver leur place dans l'oeuvre finale, la série picturale narrative Ostende, que le carnet de Dominique éclaire d'un jour nouveau.
Pour nous, lecteurs et lectrices, le carnet en sera aussi l'aboutissement, la clé de lecture et le révélateur. En voyant ce qui, de la vie des personnages et du travail de l'autrice, n'était pas visible dans les peintures, on percevra ce que les personnages projettent entre les murs d'une grange ou derrière les rideaux. On en apprendra plus sur la majorette et ceux qui l'accompagnent, on y verra des corps ou des parties de corps - bustes, fesses, visages, mains - et l'on comprendra peut-être pourquoi Irène exhibe le sien sur les plages Ostende. Ou peut-être ne le comprendra-t-on pas. On verra, mais on sera libre de donner la suite que l'on veut à ces textes et à ces scènes ouvertes à l'interprétation.
On retournera le point de vue, pour voir enfin derrière.
On verra les formes abstraites d'Ostende naître, fondre, se transformer jusqu'à devenir cristaux, roches molles, matière aux contours flous ou abrupts. On percevra des mouvements, des bruits sourdre paisiblement de l'espace vierge des pages d'un carnet, espace de liberté formelle absolue pour sa détentrice.
Plusieurs niveaux de lecture apparaîtront alors.
On pourra observer ces changements comme des mouvements primaires que l'oeil reconstitue, récits sans objet quelque part entre l'animation et la séquence, ou chaînon manquant entre le figuratif et l'abstraction. On pourra voir des personnages en train d'être créés et de se créer eux-même une nouvelle identité, cachée, imperceptible mais pourtant bien présente sur les plages d'Ostende. On verra une artiste se chercher, chercher son propos et les techniques appropriées à celui-ci, et une oeuvre se construire par touches successives, du fourmillement de tentatives chaotiques et audacieuses à la sérénité qui fait la force d'Ostende. Et l'on fera, comme elle, des va-et-vient d'un livre à l'autre, d'un format à l'autre, repérant quelles techniques, quelles présences, quelles formes ont retenu son attention, tentant de comprendre ce qui se joue en chacun des êtres et des lieux représentés.
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Cela aurait pu n'être qu'un récit burlesque, romanesque certes, mais loufoque voire foutraque. Cela aurait pu aussi être l'ouvrage d'une auteure (D. Goblet), talentueuse et reconnue, qui, dans une démarche empreinte de bons sentiments judéo-chrétiens, se serait mise au service d'un artiste brut (D. Théate) dont la jeunesse s'est fracassée dans un accident de moto...
L'Amour Dominical n'est rien de cela.
Récit d'aventure épique et relation d'un improbable triangle amoureux entre Hulk Hogan, la femme à barbe bleue et un orthodontiste criminel, cette création à quatre mains conjugue tout ce qui fait la singularité de Dominique Goblet avec les obsessions de Domi- nique Théâte : réinvention langagière, combats de catch et quête de l'amour absolu.
Les aventures du célèbre catcheur et de sa charmante épouse barbu sont rythmées par les nombreuses pages issues du journal de Théate, rédigé au jour le jour sur ordinateur, où il décrit inlassablement son quotidien prosaïque mais aussi ce fatidique accident qui l'a privé d'une réussite conformée dont il projette les fantasmes dans son récit.
La « magnifique Dominique » (surnom officiel attribué par Théate à sa comparse) se confronte ici à une poétique nouvelle, une déconstruction de la fiction dont elle s'empare avec autant de vir- tuosité graphique que de subjectivité et de profon- deur. C'est elle qui, par-delà le plaisir de la lecture d'une histoire rocambolesque, nous invite à la méditation et nous aide à envisager nos propres fragilités et notre finitude.
L'Amour Dominical est l'aboutissement d'une véritable rencontre au long cours, d'une déflagration artistique entre deux mondes (l'art et l'altérité) et du cheminement de deux êtres qui, ensemble, font acte de résilience.
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Une femme seule, bordélique et seule. Un ancien mari, policier anarchisteet amoureux. Leur fille, nageuse filiforme promise aux triomphes aquatiques,amie des homards et des grands fonds. Les candidats, issus de la sélection drastiqued'un site de rencontre régional, débarquent alors en nombre dans un vastejardin, les voilà, objets, polymorphes sexuels et corvéables. Un bite-bush, à lafois arbuste et choeur antique, observe tout et retranscrit l'histoire à sa façon,celle d'une femme entourée de livres et d'ennui faisant creuser une piscine pourretrouver ce qui est à jamais perdu. La fantasmagorie prend possession descoeurs et des âmes avant que l'on sache ce qui se cache tout au fond du trou.
Un livre à quatre mains (édité à quatre mains) où la fantasmagorie prend possession des coeurs et des âmes avant que l'on sache ce qui se cache tout au fond du trou. -
Dominique goblet pretending is lying /anglais
Dominique Goblet
- Random House US
- New York Review
- 16 Août 2022
- 9781681376806
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La plaie du crépuscule commence à éclairer un bois. On y décèle des animaux agissant comme des enfants, derrière ces agissements, des hommes en costume gèrent des négociations en quelques sales poignées de mains, derrière le masque de ces enjeux.
Né des pulsions irrépressibles, d'une force non muselée, sourd une menace. Réelle ou supposée, et cette menace envahit tout. On dit que les reliques d'anciennes croyances seront réactivées lorsque l'homme loup de l'antique forêt obscure sortira du bois.
Oeuvre composite, alliant diverses techniques, crayon, peinture, fusain, Les Hommes-Loups est un vivier dimages, un imagier riche en références, vertigineux de beauté. Chaque page une nouvelle découverte, chaque image, à elle seule, une histoire. Lhistoire décousue de la vie, déroutante et parfois effrayante, incompréhensible et sublime en fin de compte. Dominique Goblet touche avec ce livre à lirréductible de lexpérience individuelle, lune après lautre elle écorce les strates pour atteindre le noyau, le coeur de la matière.
Dominique Goblet a publié Souvenir dune journée parfaite au Frémok et Faire semblant cest mentir à LAssociation (nominé à Angoulême 2008).