dans une petite ville d'alabama, au moment de la grande dépression, atticus finch élève seul ses deux enfants, jem et scout.
homme intègre et rigoureux, cet avocat est commis d'office pour défendre un noir accusé d'avoir violé une blanche. celui-ci risque la peine de mort. ce bref résumé peut expliquer pourquoi ce livre, publié en 1960 - au coeur de la lutte pour les droits civiques -, connut un tel succès et reçut le prix pulitzer en 1961. il ne suffit pas en revanche à comprendre pourquoi ce roman est devenu un livre-culte aux etats-unis et dans bien d'autres pays, pourquoi, lors d'une enquête réalisée aux etats-unis en 1991, sur les livres qui ont changé la vie de leurs lecteurs, il arrivait en seconde position, juste après la bible.
la vérité est que, tout en situant son histoire en alabama à une époque bien précise, harper lee a écrit un roman universel sur l'enfance confrontée aux préjugés, au mensonge, à la bigoterie et au mal. racontée par scout avec beaucoup de drôlerie, cet ouvrage tient du conte, de la court story et du roman initiatique. " il a la légèreté et le poids que recherche le véritable amateur de roman et cette vertu si rare de pouvoir être lu à tout âge, quelle que soit l'éducation qu'on ait reçue, de quelque pays que l'on vienne, à quelque sexe que l'on appartienne.
on y trouvera nécessairement un univers communiquant avec le sien par le miracle de l'écriture et de l'enfance ", écrit isabelle hausser dans la postface qu'elle a rédigée pour ce livre.
Londres, 1940.
Soucieux de pallier l'anéantissement de l'armée britannique à Dunkerque, Winston Churchill a une idée qui va changer le cours de la guerre : créer une branche noire des services secrets, le Special Operation Executive (SOE), chargée de mener des actions de sabotage et de renseignement à l'intérieur des lignes ennemies et dont les membres seraient issus des populations locales pour être insoupçonnables.
Du jamais vu jusqu'alors. Quelques mois plus tard, le jeune Paul-Émile quitte Paris pour Londres dans l'espoir de rejoindre la Résistance. Rapidement recruté par le SOE, il est intégré à un groupe de Français qui deviendront ses compagnons de coeur et d'armes. Entraînés et formés de façon intense aux quatre coins de l'Angleterre, ceux qui passeront la sélection se verront bientôt renvoyés en France occupée pour contribuer à la formation des réseaux de résistance.
Mais sur le continent, le contre-espionnage allemand est en état d'alerte... L'existence même du SOE a été longtemps tenue secrète. Soixante-cinq ans après les faits, Les Derniers jours de nos pères est un des premiers romans à en évoquer la création et à revenir sur les véritables relations entre la Résistance et l'Angleterre de Churchill.
Publié en 1847, par un auteur mystérieux qui signait Ellis Bell, Wuthering Heights - devenu, sous la plume inspirée de Frédéric Delebecque, Les Hauts de Hurle-Vent - ne reçut pas d'abord un accueil enthousiaste.
Le roman ne ressemblait à rien de connu. Le style fut jugé cru et grossier. On était certes impressionné par cette lecture, mais comme on peut l'être par un spectacle dérangeant, voire révoltant. Le public victorien il était déjà victorien en effet, puisque la reine Victoria régnait depuis dix ans - fut choqué, conformément à ce qu'on attend de ce public. Celui des Etats-Unis fut plus scandalisé encore et des voix indignées s'élevèrent pour réclamer une interdiction.
La postérité a opéré un retournement complet. Le roman d'Emily Brontë a acquis un statut quasi shakespearien, en ce sens que chacun peut le lire au premier degré, mais que les spécialistes ne cessent de proposer des interprétations de plus en plus recherchées. La fascination qu'exerce chacun des personnages, l'intérêt constamment soutenu que suscitent les événements, l'élégance acérée de l'écriture, remarquable de force et d'économie, font que quiconque le prend en main ne le lâche pas, et que qui l'a lu une fois ne peut manquer d'y revenir tout au long de sa vie.
Mais les commentateurs professionnels ont accumulé sur cette oeuvre une masse d'exégèses qu'aucun autre roman britannique n'a atteinte. Comme il est difficile de choisir entre elles, on souscrit volontiers à l'opinion de l'universitaire californien J. Hillis Miller, qui dit qu'il n'y a pas de vérité cachée à trouver, mais que la substance du roman est si riche, si polyvalente, que chacune des interprétations contient une part de vérité.
HENRI SUHAMY
Quoi de neuf ? Pagnol.
Écrit et réalisé en pleine guerre, La Fille du Puisatier fut projetée en France à la fin de 1940. Soixante-dix ans plus tard, Daniel Auteuil, qui fut l'inoubliable Ugolin de jean de Florette, est passé derrière la caméra. Avec une pléiade de comédiens remarquables - Kad Merad, Sabine Azéma, Jean-Pierre Darroussin, Nicolas Duvauchelle, Astrid Bergès-Frisbey - il nous fait revivre l'histoire de Patricia, la fille d'un terrassier provençal séduite par un jeune aviateur en permission.
Les textes de la grèce antique ont pénétré d'abord le monde romain, puis toute la culture européenne ; et leur influence s'exerce encore en notre temps, de cent façons.
Pourquoi ? telle est la question que jacqueline de romilly se posait vaguement au cours de ses recherches sur telle ou telle oeuvre grecque et qu'elle aborde enfin de front. ces textes et cette culture de la grèce antique avaient-ils donc en commun quelque chose de particulier, pour justifier une influence pareille ? la réponse est que toutes ces oeuvres cherchaient, de façon constante, obstinée, délibérée, à atteindre l'universel, c'est-à-dire, précisément, ce qui pourrait toucher les hommes, en tous temps et en tous lieux.
Cela fut le cas pour la grèce en général, et plus encore pour l'athènes du ve siècle. cette tendance a pris des formes diverses ; simplification des personnages, symboles, mythes, formulations abstraites, tentatives pour fonder des sciences de l'homme, tout se rejoint. le livre le montre en une série de chapitres : homère et pindare, d'abord, puis athènes, avec sa démocratie et le développement de la réflexion politique, l'invention de l'histoire, de la tragédie, de la philosophie.
Chaque fois, la même tendance est serrée de près, et permet de comprendre l'originalité des oeuvres. dans ce livre, jacqueline de romilly ne défend pas, comme ailleurs, le grec, mais bel et bien la grèce, et le caractère unique de son apport à notre civilisation, qu'elle marque encore de façon vivante.
Reproduction conforme à l'édition originale avec les illustrations de Madeleine Lemaire et les partitions de Reynaldo Hahn.
«Il nous attire, il nous retient dans une atmosphère de serre chaude, parmi des orchidées savantes qui ne nourrissent pas en terre leur étrange et maladive beauté. Soudain, dans l'air lourd et délicieux, passe une flèche lumineuse, un éclair qui, comme le rayon du docteur allemand, traverse les corps. D'un trait le poète a pénétré la pensée secrète, le désir inavoué.
C'est sa manière et son art. Il y montre une sûreté qui surprend en un si jeune archer. Il n'est pas du tout innocent. Mais il est si sincère et si vrai qu'il en devient naïf et plaît ainsi. Il y a en lui du Bernardin de Saint-Pierre dépravé et du Pétrone ingénu».
(ANATOLE FRANCE, Préface, 21 avril 1896).
«?Les qualités de ce livre délicat, paru en 1896, me paraissent si éclatantes, que je m'étonne qu'on n'en ait pas été d'abord ébloui».
(ANDRÉ GIDE,«En relisant Les Plaisirs et les Jours», 1er janvier 1923).
Auteur d'une vingtaine de livres et de plusieurs centaines d'articles, parent de Bergson et de Proust, ami de Drieu La Rochelle et de Malraux, Emmanuel Berl a occupé une place importante dans la littérature de l'entre-deux-guerres.
Il est aujourd'hui très injustement oublié. Voici l'occasion de découvrir un des " grands méconnus " de ce siècle. Modèle d'esprit critique, sans conformisme, sans sectarisme, sans dogmatisme, il est un représentant très original de la pensée libérale. Il est aussi, par l'acuité de son jugement et la limpidité du style, un grand moraliste français. Essayiste, historien, pamphlétaire, journaliste politique, écrivain d'art, mémorialiste, Berl a touché à beaucoup de genres.
Il passe de Tamerlan à l'affaire Dreyfus, d'un cours de Bergson à une lecture de Simone Weil, de la sagesse de Goethe à l'amour chez Proust, de la Kabbale à la psychanalyse. Il lit, il regarde, il écoute, il réfléchit, il commente. A travers mille anecdotes, portraits, souvenirs ou citations, il s'interroge aussi sur l'oubli, le progrès, le langage, la culture, la réflexion, la mort. Il avait un goût extrême de l'amitié.
Dans les hommages qu'il a rendus à tel ou tel de ses amis - Daniel Halévy, Martin du Gard, Camus et bien d'autres -, c'est lui que nous voyons comme dans un miroir. Dans ces textes, classés par thèmes mais si divers, on trouvera le meilleur de Berl. Car il n'est jamais plus frappant que quand il réagit à une lecture ou à un événement, passant de la réaction à la réflexion et s'élevant avec facilité à l'essentiel.
Il faut lire les écrivains morts non pour les juger mais pour la nourriture qu'ils nous apportent. La lecture de Berl est l'une des plus enrichissantes qui soient. Elle nous permet de rencontrer l'un des esprits les plus complets, les plus intelligents, les plus justes de notre temps.
En 1881, Marx et Darwin voisinaient dans la région londonienne sans se connaître. Ils ne se sont sans doute jamais vus, mais leur rencontre n'aurait rien eu d'invraisemblable.
Marx admirait l'auteur de L'Évolution des espèces (1859). Il lui avait dédicacé un exemplaire du Capital (tome I, 1867). Darwin était pour lui le héros qui avait mis définitivement fin à l'«aliénation religieuse» en sapant scientifiquement par ses découvertes les fondements des récits bibliques, réduits à l'état de fables.
Darwin voyait en Marx un esprit généreux mais quelque peu chimérique, promettant l'avènement d'un nouveau Paradis Terrestre, mais il n'était pas insensible à son matérialisme foncier.
Ils avaient des ennemis communs: Darwin était surnommé «le chapelain du Diable» par les milieux anglicans, piliers d'une société victorienne qui vouait aux gémonies le chantre de la révolution prolétarienne.
En 1881, ils étaient tous les deux d'une santé chancelante. Darwin disparaîtra en 1882 et Marx en 1883.
Ilona Jerger imagine qu'ils étaient soignés par le même médecin, nommé Beckett, un philanthrope libre-penseur qui s'intéressait tout autant à leurs idées qu'à leurs maladies et leur témoignait la même sympathie active.
Il avait perçu leurs affinités profondes. Il mesurait leur stature intellectuelle, en un mot leur génie.
Beckett est bien entendu un personnage de fiction. C'est aussi un confident de tragédie. Il accompagnera ses deux amis jusqu'à leur mort.
Unité de temps (1881), unité de lieu (Londres, où habite Marx dans un quartier fort modeste, et la campagne avoisinante où Darwin réside bourgeoisement), unité d'action (la rencontre et la mort de deux des plus grands esprits du XIXe siècle) donnent au récit la cohérence et la force d'une pièce classique.
L'oeuvre se compose des visites alternées de Beckett à ses deux illustres patients, dépouillés par la maladie de tout faux-semblant. Sous le regard à la fois lucide et chaleureux du praticien, deux portraits contrastés et fraternels se dégagent peu à peu des conversations, des confidences, des souvenirs, des accès d'humeur ou des rêves, des défaillances ou des espoirs dont Marx et Darwin nous font les témoins.
Nous partageons leurs derniers mois. Nous revoyons aussi le film de leurs vies.
La réussite de ce livre, fondé sur une connaissance approfondie des deux oeuvres laissées par les deux grands savants, comme de la bibliographie qu'ils ont inspirée, c'est que les exposés d'idées n'entravent ni n'alourdissent la reconstitution colorée de la vie quotidienne. Une vie quotidienne perçue dans toutes ses dimensions : la dimension tragique puisque la mort est déjà à l'oeuvre, la comédie, par la multiplication des notations réalistes délicatement humoristiques, la finesse de l'analyse psychologique, notamment dans les rapports de Marx et de Darwin avec leur entourage.
Il s'agit d'un premier roman mais où s'affirment déjà une maîtrise intellectuelle, un talent narratif et des qualités d'expression admirablement servies par la traduction de Bernard Lortholary.
Raymond Aron est inclassable.
Intellectuel anticonformiste, il est allé à contre-courant des idées dominantes de l'intelligentsia de gauche. Il a eu raison avant les autres sur la nature du régime soviétique, du stalinisme. Et dans les années 50, il a eu le courage de tenir sa position, tout en accomplissant une oeuvre scientifique indiscutée. À la fois journaliste, sociologue, historien, philosophe, Raymond Aron retrace dans ces entretiens avec Jean-Louis Missika et Dominique Wolton son itinéraire politique et intellectuel.
Dans ce dialogue vif, stimulant, il analyse les grands événements qu'il a vécus depuis un demi-siècle. La montée de Hitler au pouvoir, le Front populaire, Munich, la débâcle, Vichy et la Résistance, le génocide, la guerre froide, ses polémiques avec Jean-Paul Sartre et Maurice Merleau-Ponty, la construction européenne, la stratégie nucléaire, l'Algérie et la décolonisation, le gaullisme, Mai 68, l'Union de la gauche...
On découvre dans cette réédition du Spectateur engagé une conception de l'Histoire qui laisse sa part à la liberté des hommes, un plaidoyer pour la démocratie occidentale, mais aussi une personnalité complexe, lucide et passionnée.
Pas si calme relate l'épopée quotidienne de six jeunes Anglaises engagées volontaires dans le service ambulancier pendant la guerre de 14. Leur mission: recueillir les corps martyrisés des morts et des blessés, transporter les survivants souvent abominablement mutilés ou hurlant de douleur, jusqu'aux hôpitaux qui pour beaucoup seront leur dernière demeure. Ces «glorieuses filles d'Angleterre» vont découvrir la géographie de l'Enfer, ce que l'on appelle la «zone interdite», un désert labouré d'obus qui sépare les tranchées de l'arrière. Au terme de chaque voyage macabre dans le froid et dans la nuit, de nouvelles épreuves les attendent: les corvées de caserne les plus rebutantes, les nuits sans sommeil, l'insalubrité, l'invasion de la vermine, la plus innommable des pitances militaires.
Lorsqu'il parut en 1930 le livre fit scandale. La traduction française (1931) reçut néanmoins le prix Séverine décerné au meilleur roman conçu pour promouvoir la paix dans le monde.
Il fut ensuite oublié. Il reparaît aujourd'hui dans une version nouvelle.
Helen Zenna Smith est le pseudonyme d'Evadne Price (1897-1985), qui transposa sur le mode de la fiction le journal minutieusement tenu par l'une de ses amies.
Simone de Beauvoir écrit dans La Force de l'âge que la lecture de cet irrécusable témoignage l'avait bouleversée.
À la recherche du temps perdu est l'un des plus grands livres du XXe siècle. De Proust on a dit qu'il était toute la littérature, comme Bach était toute la musique. Pourtant, nombreux sont encore ceux qu'il intimide ou qu'il déconcerte. Cette introduction a été composée à leur intention par l'un des meilleurs connaisseurs de son oeuvre, Bernard de Fallois, qu'une savante publication universitaire, la revue Genesis, qualifie de «proustien capital». Mais que l'on se rassure. Peu soucieux d'en imposer par le poids de l'érudition, Bernard de Fallois vise surtout la limpidité, la concision, la clarté qui n'exclut pas, bien au contraire, la densité de son propos. Il parvient à mettre à la portée de tous l'essentiel de ce qu'il faut savoir pour lire intégralement cette oeuvre capitale, pour admirer sa nouveauté, mesurer sa grandeur qui va de pair avec un génie comique rarement égalé depuis Molière.
Cette introduction est également complétée par un précieux recueil de maximes et de pensées glanées au cours des pages de la Recherche. Elles rappellent que notre plus grand romancier fut aussi le plus parfait continuateur des moralistes du Grand Siècle.
Suivi de «Aux sources de la Recherche du temps perdu». Textes transcrits, annotés et présentés par Luc Fraisse, professeur à l'Université de Strasbourg.
Avec ce recueil de nouvelles et de textes divers inédits[1] nous remontons aux sources de la Recherche du temps perdu.
Dans les années où il ébauche le roman qui deviendra Jean Santeuil, Proust, âgé d'une vingtaine d'années, compose de courts textes de fiction, qui sont autant d'esquisses où l'on peut déjà entrevoir les personnages, les situations, les réflexions qui jalonneront la carrière mondaine, la vie affective et l'évolution spirituelle du Narrateur depuis son enfance dans Du côté de chez Swann jusqu'à l'illumination du Temps retrouvé.
Cet ensemble paraît en 1896 avec une préface d'Anatole France. Il a pour titre Les Plaisirs et les Jours. S'il est salué par quelques critiques amicales, son importance littéraire n'est guère perçue avant le début des années 1920, c'est-à-dire après la mort de l'auteur, dont on ne peut plus méconnaître le génie. Mais il retombe dans l'oubli jusqu'au début des années cinquante, lorsque Bernard de Fallois, avec Jean Santeuil (1952) et Contre Sainte-Beuve (1954) jusqu'alors inédits, met en pleine lumière la genèse de l'oeuvre proustienne.
C'est alors que Bernard de Fallois, «?le proustien capital?» selon l'heureuse expression de Mme Nathalie Mauriac, découvre, en rassemblant des manuscrits dispersés, un ensemble de neuf nouvelles initialement destinées à figurer dans Les Plaisirs et les Jours, et dont aucune n'avait jamais été publiée, pas même en revue.
Il en fit une analyse méthodique dans un chapitre de sa thèse de doctorat, chapitre qui a été tout récemment publié (Proust avant Proust).
Ces textes portent la marque d'un travail approfondi?: corrections, variantes, repentirs, changements de noms, par exemple.
La plupart de ces courts récits obéissent aux lois du genre?: mise en scène d'une situation, péripéties, chute finale. Dans quelques cas il s'agit d'une libre méditation esthétique et philosophique («?Après la 8e Symphonie de Beethoven?»). On y voit le jeune écrivain multiplier les expérimentations narratives suggérées parfois par ses lectures mais déjà résolument engagé dans le processus de création qui annonce par bien des signes l'oeuvre future.
Une question se pose d'emblée?: pourquoi Proust a-t-il écarté des Plaisirs ces textes qui étaient mentionnés dans le sommaire initial intitulé «?Le Château de Réveillon?» et en a-t-il laissé quelques-uns dans un état de relatif inachèvement?? Il faut évidemment peser la réponse avec la plus grande circonspection.
Sans doute considérait-il qu'en raison de leur audace ils auraient pu heurter un milieu social où prévalait une forte morale traditionnelle. Sans recourir à l'érudition biographique, cette interprétation n'est certainement pas arbitraire si l'on songe au rigorisme des «?gens de Combray?», tel qu'il est évoqué dans la première partie de Du côté de chez Swann, par exemple.
En effet le thème dominant de ces oeuvres, c'est l'analyse de «?l'amour physique si injustement décrié?» (Swann) en des termes qui annoncent et préfigurent Sodome et Gomorrhe, soit directement soit par voie de transposition.
C'est donc en partie, sous le voile d'une fiction transparente, un «?Journal intime?» de l'écrivain. La prise de conscience de l'homosexualité y est vécue sur le mode exclusivement tragique, comme une malédiction. On n'y trouvera aucune de ces notations comiques, introduites ici ou là tout au long de la Recherche, et qui confèrent à l'oeuvre toutes les couleurs de la vie, même au sein des drames les plus sombres. Mais Proust est déjà là avec sa parfaite maîtrise de l'expression. L'influence stylistique des contemporains, d'Anatole France à Henri de Régnier, de Paul Hervieu à Robert de Montesquiou, y est sensible. Tout comme celle des modes de l'époque mais la phrase porte déjà la marque du classicisme. Certes, on ne rencontre guère l'éblouissante pyrotechnie verbale où l'art de la métaphore filée, tour à tour ironique et poétique, souvent déconcertante dans son apparente fantaisie et toujours rigoureuse et suggestive, ne cesse de nous enchanter. Ces pages inédites n'ont pas la perfection de la Recherche mais précisément elles nous aident à la mieux comprendre en nous révélant ce que fut son début.
(Autre hypothèse?: Proust aurait écarté ces textes parce qu'ils déséquilibraient Les Plaisirs et les Jours. C'est possible mais rien ne vient étayer cette interprétation.) Le volume est complété par un ensemble de documents présentés par Luc Fraisse sur les sources de la Recherche?: notes de lectures, analyses d'ouvrages philosophiques, ébauches préparatoires de passages devenus célèbres (comme le début si souvent cité?: «?Longtemps je me suis couché de bonne heure?»), brèves notations sur les modèles masculins de Gilberte, première esquisse de la rencontre entre Charlus et Morel, ou bien encore ce «?divertissement?» en alexandrins intitulé «?À l'ombre des jeunes gens en fleurs?».
On se souvient que le jeune Narrateur, dans ses promenades solitaires mais souvent exaltées autour de Combray, dans la vaine recherche d'une grande idée philosophique autour de laquelle organiser ses impressions, désespérait de devenir jamais «?le premier écrivain de l'époque?». Il espérait néanmoins - plaisamment - y parvenir grâce aux relations de son père, à l'aide du gouvernement et de la Providence.
Nous voyons bien, en lisant attentivement Le Mystérieux Correspondant, qu'il avait déjà très tôt trouvé seul, résolument et sûrement, et sans l'aide d'aucune puissance extérieure, le chemin de son grand rêve.
Cet exceptionnel ensemble sortira au moment où l'on célébrera le centième anniversaire de l'attribution du Prix Goncourt à Proust pour À l'ombre des jeunes filles en fleurs (1919).
Dans la nuit du 12 au 13 juin 1998, alors qu'il naviguait vers l'Ecosse, Eric Tabarly fut frappé par la corne d'une voile au cours d'une manoeuvre et disparut en mer.
Il était une légende vivante, le destin lui a donné la mort des héros de légende. Il est mort comme il avait vécu, " une voile au coeur ". L'an dernier, pour la première fois, Tabarly le discret, le silencieux, Tabarly qu'on disait taciturne était sorti de sa réserve, et avait écrit ses mémoires. Il parlait de sa vie, de son enfance, de ses années d'apprentissage. Il racontait l'Ecole navale, le Maroc, l'Indochine.
Et surtout il disait sa passion, unique et absolue, pour un bateau, le plus célèbre bateau de France, celui dont le nom restera à jamais lié au sien, la " mésange à tête noire ", Pen Duick. Parce que son père l'y avait embarqué à l'âge de sept ans, parce qu'il lui avait fait cadeau à sa majorité de ce vieux cotre de bois à moitié pourri, promis à la casse, il a fait tout ce qu'un homme pouvait faire, et plus encore, pour le sauver.
Inventeur infatigable et génial, il lui donnera des successeurs : de Pen Duick II, qui lui valut sa première grande victoire en 1964, à Pen Duick IV, premier grand trimaran de course, et enfin Pen Duick VI, superbe ketch de vingt-deux mètres, avec lequel il gagnera sa deuxième Transat en solitaire en 1976. Nous verrons apparaître de jeunes équipiers encore inconnus - Kersauson, Colas, Coste, Lamazou, Poupon - qui seront tous à son école et qui deviendront à leur tour célèbres.
Mais toujours, c'est à son vieux Pen Duick qu'il revient. Celui dont il attendait avec tant d'impatience de fêter le centenaire. Et dont il avait écrit, cédant un jour à l'émotion : " Il est là, superbe, sous son gréement aurique, humant le vent, évaluant la force de la mer, frissonnant dans l'attente de la première risée : objet d'art, précieux, exigeant, sensuel, vif, capricieux, tel est Pen Duick, mon bateau.
"
Découvrez Les Carnets du Major Thompson - Suivi de Les Carnets du Bon Dieu, Le Secret du Major Thompson, Le Jacassin, Le Major tricolore, Ludovic Morateur, Les Touristocrates, le livre de Pierre Daninos. "Ce n'est pas me diminuer que de penser qu'un jour je serai probablement classé parmi les écrivains mineurs de ce temps. Je suis assez modeste pour le supporter, assez orgueilleux aussi pour penser que si un auteur de l'an 2100 veut étudier les moeurs de notre époque, et notamment le caractère des Français, leurs comportements, leurs tics de langage, il pourra trouver matière dans plusieurs de mes livres" Daninos.
Au tout début du XXe siècle, un fait divers singulier défraye la chronique de Saint-Pétersbourg, la capitale de l'Empire russe: un tigre fait régner la terreur dans la lointaine Sibérie. Il décime les troupeaux et massacre les villageois. Rares sont les voyageurs qui échappent à ses assauts.
Le Tsar promet alors une récompense fabuleuse à qui parviendra à abattre le fauve: le poids du Tigre en pièces d'or.
Les chasseurs de prime affluent vers la Sibérie, mais sans grand succès. L'animal évente leurs pièges et disparaît dans la steppe.
Jusqu'à ce qu'un jeune Pétersbourgois, Ivan, décide de se lancer à son tour dans l'aventure. Pour venir à bout du Tigre, il conçoit un stratagème aussi implacable que terrifiant. Mais le piège ne risque-t-il pas de se refermer sur lui?
Le Tigre est l'un de ses tout premiers textes de Joël Dicker, écrit en 2004, à l'âge de dix-neuf ans, à l'occasion d'un concours littéraire. C'est cette nouvelle qui lui donnera envie de se consacrer à l'écriture.
En hommage à un autre grand Provençal, Alphonse Daudet, Marcel Pagnol souhaite tourner plusieurs de ses Lettres de mon moulin. En 1954 il adapte Les Trois Messes basses, L'Elixir du père Gaucher et Les Secrets de maître Cornille. En 1967 il réalise pour la télévision Le Curé de Cucugnan. Contrairement à ce qu'il a fait pour la plupart de ses pièces, il n'a pas écrit de préface. Mais le prologue, dans lequel il s'exprime sur cette question de "l'identité", devenue si à la mode aujourd'hui, a été pour lui l'occasion d'exprimer certaines vérités de bon sens que tout le monde aura plaisir à relire.